dimanche 16 décembre 2007

J'ai froid, j'ai froid, cet homme me glace !

Pour avoir bravé les rigueurs de l'Hiver en compagnie de Fuv et Fudoh ( même pas pour me gorger de vin chaud avec eux, mais pour m'en débarrasser dans un train hors de prix !) et pour pouvoir tranquillement aller pioncer après avoir commis une note facile, je vous propose un poème en prose d'Aloysius Bertrand tiré de son Gaspard de la Nuit qui retranscrit une conversation autour d'un feu pendant une nuit glaciale qui n'est pas sans rappeler celle que nous eûmes en rentrant chez moi à pied.
( à mon grand désarroi, je note que l'amusement que je prends à ce blog insane déteint sur le ton sombre qui devait être le sien ; il faut que je me reprenne en main et que je parle de trucs plus tristes... peut-être la baisse du pouvoir d'achat ? M'enfin, j'entame du moins mon retour dans le droit chemin de l'obscurité, puisqu'Aloysius Bertrand est un de nos poètes maudits, mort de phtisie à l'hôpital, à l'âge de 34 ans, son oeuvre poétique impubliée de son vivant).

Ante post blogum : Pas de commentaire de texte cette fois-ci, de temps en temps je sais me forcer à savourer un texte sans blablater autour ( généralement quand je suis bien fatigué ^_^, ).



A M. Louis Boulanger, peintre.

II
Les Gueux de nuit

J'endure
froidure
bien dure.
La Chanson du Pauvre Diable


- « Ohé! rangez-vous qu'on se chauffe ! » - «Il ne te manque plus que d'enfourcher le foyer ! Ce drôle a les jambes comme des pincettes. »


- « Une heure ! » - « Il bise dru ! » - «Savez-vous, mes chats-huants, ce qui fait la lune si claire ? » - «Non ! » - «Les cornes de cocus qu'on y brûle. »


- « La rouge braise à brûler de la charbonnée ! » - « Comme la flamme danse bleue sur les tisons! Ohé! quel est le ribaud qui a battu sa ribaude ? »


- « J'ai le nez gelé ! » - « J'ai les grêves rôties ! » - « Ne vois-tu rien dans le feu, Choupille ? » - « Oui ! une hallebarde. » - « Et toi, Jeanpoil ? » - « Un oeil. »


- « Place, place à M. de la Chousserie ! » - « Vous êtes là, Monsieur le procureur, chaudement fourré et ganté pour l'hiver ! » - « Oui-dà! les matous n'ont pas d'engelures ! »


- « Ah! voici messieurs du guet ! » - « Vos bottes fument. » - « Et les tirelaines ? » - « Nous en avons tué deux d'une arquebusade ; les autres se sont échappés à travers la rivière. »

*
Et c'est ainsi que s'acoquinaient à un feu de brandon, avec des gueux de nuit, un procureur au parlement qui courait le guilledou, et les gascons du guet qui racontaient sans rire les exploits de leurs arquebuses détraquées.

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