samedi 24 novembre 2007

Retour dans la remise

Maintenant que je vous ai trompés en vous attirant ici avec une image appétissante, il est temps que je vous serve une autre histoire joyeuse du livre de Borchert. C'est une de mes préférées. Le jeu d'écho sur les phrases évoque bien l'effet de la fièvre. Enfin, dans le texte original en allemand. Vous devrez pour votre part partir en exploration sur le net ou vous contenter de mon infâme traduction en français. Et maintenant... enjoy ! ( hum! si vous y arrivez ^_^, )

Les cerises

A côté tinta un verre. En ce moment il est en train de manger toutes les cerises qui étaient pour moi, pensa-t-il. Alors que j’ai la fièvre. Elle avait exprès placé les cerises devant la fenêtre pour qu’elles soient bien fraîches. Et maintenant il a jeté le verre par terre. Et j’ai la fièvre.
Le malade se leva. Il se traîna le long du mur. Il vit alors par la porte que son père était assis par terre. Il avait la main pleine de jus de cerise.
Pleine de cerises, pensa le malade, pleine de cerise. Alors que je devais les manger. Et que j’ai la fièvre. Il a la main pleine de jus de cerise. Elles étaient sûrement déjà froides. Elle les avait exprès placées devant la fenêtre pour la fièvre. Et il me les mange toutes. Il est là assis par terre et il en a plein les mains. Et j’ai la fièvre. Et il a du jus de cerise froid sur la main. Du bon jus de cerise froid. Il était sûrement bien froid. Il était justement placé exprès devant la fenêtre. Pour la fièvre.
Il s’appuya sur la poignée de porte. Le père releva la tête car elle couina.
Mon garçon, tu dois retourner au lit. Avec ta fièvre. Tu dois retourner tout de suite au lit.
Pleine de cerises, murmura le malade. Il fixait la main. Pleine de cerises.
Tu dois retourner tout de suite au lit. Le père essaya de se lever et grimaça. Sa main gouttait.
Toutes les cerises, murmura le malade. Toutes mes cerises. Etaient-elles froides ? demanda-t-il tout haut. Non ? Elles étaient donc sûrement déjà froides, hein ? Elle les avait exprès placées devant la fenêtre pour qu’elles soient bien fraîches. Pour qu’elles soient bien fraîches.
Le père le regarda désemparé d’en dessous. Il rit un petit peu. Je n’arrive pas à me relever, rit-il et il grimaça. C’est vraiment trop bête, je n’arrive tout simplement pas à me relever.
Le malade s’appuya sur la porte. Celle-ci bougeait doucement d’avant en arrière du fait de ses tremblements. Etaient-elles déjà froides ? murmura-t-il, oui ?
Je suis juste tombé, dit le père. Mais plus de peur que de mal. J’en suis tout paralysé, rit-il. C’est à cause de la surprise. Ca va revenir. Ensuite je te ramène au lit. Tu dois vite retourner au lit.
Le malade observait la main.
Ah, c’est pas si grave. C’est juste une petite coupure. Ca va vite arrêter de couler. Ca vient de la tasse, conclut le père. Il leva la tête et grimaça. Avec un peu de chance elle ne sera pas fâchée. Elle aimait justement tellement cette tasse. Et voilà que je l’ai cassée. Précisément la tasse qu’elle aimait tellement. Je voulais la passer sous l’eau et hop j’ai glissé. Je voulais la passer sous l’eau pour la rafraîchir et mettre tes cerises dedans. Avec un verre c’est si inconfortable de boire au lit. Je le sais bien. C’est pour ça que c’est tellement inconfortable de boire au lit.
Le malade observait la main. Les cerises, murmura-t-il, mes cerises ?
Le père essaye encore une fois de se relever. Je te les amène tout de suite, dit-il. Tout de suite, mon garçon. Retourne vite au lit avec ta fièvre. Je te les amène tout de suite. Elles étaient encore devant la fenêtre, alors elles sont bien froides. Je te les amène immédiatement.
Le malade retourna dans son lit en s’appuyant au mur. Quand le père vint avec les cerises, il s’était enfoui sous les couvertures.

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